Le temps des Fêtes est une période magique. Les familles se rassemblent, les cœurs sont gais. Tous les ans, on se dit que c’est trop long une année complète sans se voir. Pour les plus petits comme les plus grands, l’attente est toujours interminable.

Les Fêtes nous offrent normalement la chance de nous réunir pour chanter, pour danser et pour rire. Que ce soit mon’oncle qui gratte sa guitare, ou un album de Michael Bublé qui passe en boucle à l’épicerie, la musique des Fêtes nous accompagne tout le long du mois de décembre et une partie de janvier. Au début de l’hiver, nos vies sont ponctuées de chansons festives et tellement accrocheuses qu’elles nous restent en tête durant des semaines. J’en parle et j’ai le goût de danser un set carré. Y a-t-il un violoneux dans l’assistance ?

Le temps des Fêtes dans nos campagnes, c’est le grand manteau blanc qui couvre les champs, c’est avoir le nez rouge comme Rudolph parce qu’il fait si froid dehors, c’est dégivrer la voiture et la laisser tourner quelques minutes pour qu’elle se réchauffe, c’est mettre du sel dans l’entrée avant que la visite arrive. C’est aussi l’occasion d’enfiler nos plus beaux gréments, question de faire honneur à nos invités. On oublie un peu la froidure hivernale, l’espace de quelques jours, pour préparer nos cœurs et nos maisons à la venue de celles et ceux qu’on aime.

Je me souviens des réveillons de ma jeunesse ! Ma tante et mon oncle nous recevaient chez eux. En tout, il devait y avoir environ quarante personnes. Chacun se pointait avec sa marmaille : les bottes allaient dans le bain, les manteaux s’empilaient sur le lit, on se passait le sac plein de pantoufles en Phentex, on donnait deux becs à ma’tante et la fête pouvait enfin commencer ! On descendait au sous-sol en procession, du plus petit au plus grand. La famille était assise dans un genre de cercle qui longeait les murs et les enfants jouaient au centre. Le regard des enfants s’illuminait à la vue du sapin, des guirlandes et des décorations. Quand j’étais petit, j’adorais m’asseoir quelques instants dans les escaliers et observer la scène.

Certains de mes oncles jouaient aux cartes et prenaient un petit coup dans la cuisine en haut. Les grands cousins se joignaient parfois à eux. Moi, je préférais aller m’asseoir au sous-sol avec les chanteurs et les musiciens. À mes yeux, rien ne pouvait surpasser ces moments passés avec eux. J’ai passé tellement d’heures à écouter les membres de ma famille chanter ! Moi aussi, quand je suis devenu un peu plus vieux, je me suis joint à eux. J’avais mes classiques ! En toute franchise, je les volais à mon père qui devait connaître plus de vingt différentes chansons à répondre. Vingt, c’est bien, mais ce n’est pas si impressionnant : la légende veut que mes grands-parents paternels, à l’époque où ils se courtisaient, pouvaient chanter une veillée complète sans répéter la même chanson deux fois. J’aurais payé cher pour voir ça !

Tout le monde fumait : je revois le smog dans les hauteurs du plafond ! Entre deux chansons, les grands placotaient autour d’une bière. Le ton montait parfois, mais tout se faisait dans la bonne humeur. Je me souviens du bol à punch… Quand maman ne me regardait pas, j’en buvais en cachette. À côté, la grande table croulait sous la multitude de plats faits maison. Les tourtières, la dinde et les pâtés côtoyaient ces desserts qu’on ne voit que lors des grands rassemblements. Rien n’était laissé au hasard ! Chaque année, ma tante passait des semaines à cuisiner pour son monde. Elle faisait tout et elle tenait à le faire seule. Ça lui faisait plaisir. On se remplissait la panse, on se remémorait de vieilles histoires, on jouait de la musique et, surtout, on était heureux.

Quand j’étais plus jeune, je ne me rendais pas compte de tout. Ça se passait si rapidement, comme par magie. Mes yeux n’étaient pas assez grands pour tout voir, mes oreilles n’étaient pas assez fines pour tout entendre et mon cœur n’était pas assez gros pour emmagasiner autant d’amour et de chaleur humaine. Quand on est jeune, on ne fait pas souvent l’effort de se souvenir de tout ce dont on voudra se rappeler quand on sera plus vieux. On se dit que le temps des Fêtes reviendra l’an prochain, et l’année d’après, puis celle d’ensuite. J’ai maintenant vieilli un peu. J’ai commencé à vouloir revivre les fêtes du passé. J’aurais envie d’être plus jeune pour revisiter certains moments, afin d’aller chercher le petit bout de souvenir qui manque à ma collection.

Certes, cette année, les célébrations seront bien différentes. La pandémie fait en sorte que bien des familles ne se verront pas. Pour plusieurs, l’hiver sera encore plus froid qu’à l’habitude. Prenez le temps d’appeler les gens qui vous sont chers. Envoyez des photos du petit dernier à grand-maman et grand-papa, chantez quelques cantiques et donnez-vous la peine de vous remémorer les bons moments passés en famille et entre amis. Soyez créatifs et dénichez une façon de célébrer avec celles et ceux qui vous entourent.

Joyeuses Fêtes, soyez prudents !

Julyen Renaud

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